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Un jour, je me suis dit: "Que fais-tu de beau en ce moment, t'as pas envie de bouger un peu?" J'exerçais à l'époque le valeureux métier d'électricien-chauffagiste dans une société de la banlieue parisienne, mais mécanicien sur engins de travaux publics de formation.

            Alors, après quelques recherches, j'ai posé ma candidature pour faire partie d'une "expédition" en Antarctique. Et les Expéditions Polaires Françaises m'ont engagé, pour m'occuper des engins situés là-bas, et les garder opérationnels, activité essentielle, tout de même.... Et on n'utilise plus les chiens depuis des lustres. J'ai donc travaillé pendant quelques mois, à Paris, vers la Porte Dauphine, où nous furent présentés les permanents, le matériel et les objectifs. Et quelques stages de perfectionnement plus tard, moi et mes camarades nous voyons signifier notre départ à l'autre bout de la terre. Joyeux et emballés étions-nous....

 ............Nous posons nos pénates d’abord en Tasmanie, après un périple aérien qui passait par New Dehli, Perth, Adélaïde pour cause de problème technique et Melbourne. Le 1er décembre, j’avais 24 ans ce jour-là, nous arrivions à Hobart..Après quelques jours de tourisme dans cette île insolite, dont j'ai curieusement gardé le souvenir d'arbres pétrifiés, nous embarquons sur ce qu'on appelle un cargo mixte, moitié fret, moitié passagers. Un bateau polaire à quille arrondie, cette configuration évitant au navire de se faire prendre en étau par les glaces. Ce qui, par la même occasion, enlève aussi de la stabilité faute de quille; et on doit passer les quarantièmes rugissants, les cinquantièmes hurlants, et les soixantièmes mugissants; tout un programme ! Dont les vagues monstrueuses de ces latitudes vont transformer notre "Thala Dan" en bouchon balloté par les éléments.

...........Je ne savais pas avant de partir si j’étais sujet au mal de mer, ce qui comme test grandeur nature, relève du Graal des navigateurs.Et j’ai de la chance, non, pas de "seasick" à bord pour moi. Le seul souci, c’est de garder l’équilibre, les autres, malades, restent au lit, il paraît que c’est atroce. Même au lit, on se cogne la tête...Enfin bref ! Il y a 2700 Km de Hobart à la base Dumont d’Urville, 12 jours nous ont été nécessaires

            5 de lessiveuse, et 7 de deux pas en avant, trois pas en arrière à quelques miles du but, il faut pousser le pack de glace ou faire des zigzags. Mais plus on descend, plus le jour s’allonge et dans les soixantièmes, il fait jour tout le temps, on ne verra pas la nuit avant mars. Assez déroutant.Ca fraîchit, mais pas de températures glaciales, sauf en cas de tempête, et il y’en a souvent à mi-chemin. Après, arrivés vers le continent, ça se calme. D’autres tempêtes nous attendent, mais elle viendront du pôle, ce ne sont pas les mêmes. Blizzards et vents catabatiques, sont leurs noms.

            Et puis, les baleines, orques et manchots, font leur apparition, ces derniers sur les petits (ice)bergs, jaillissent comme des torpilles de l’eau à 2 m et atterrissent sur la glace.

Ca, c’est le début de  la balade, c’est joli, passionnant,mais on commence ressentir l’éloignement. Des questions se posent. Nous repensons aux mois précédents, aux motivations qui nous ont menées ici...L'émotion, la fierté d'être ici me gagnent. . 

            Et on est une soixantaine pour la période d’été, mais on sera 28 durant l’hivernage. Pour ça, il faut qu’on soit psychologiquement fiable, ne pas perdre les pédales, à 20 000Km de la métropole!

3 jours de tests à Paris, ont prédit que cela ne se produirait pas...Sur une péniche, ces tests, bon début.

            Le Thala Dan, un bateau polaire norvégien qui faisait la navette à l’époque, c’était d’ailleurs son dernier voyage, mais on ne le savait pas, heureusement. Une mauvaise surprise nous attendait au retour, mais on n’en est pas là...

            Il faut savoir que le bateau fait deux allers-retours avec la Tasmanie ou l’Australie durant l’été. Il est affrété environ 8 mois, de son départ du Havre en septembre jusqu’à son retour en avril/mai. Je l’aurais bien faite la balade, moi !!! Le Havre-Hobart, tu parles d’une croisière !!!

            A son premier voyage, donc de relève du personnel, il amène 300 m3 de fuel spécial sans paraffine, puisque stocké dehors. Et de la nourriture pour deux ans, au cas où... (N’oubliez pas que je vais parler de la 32ème expédition, et qu’ils en sont à la 62ème maintenant.)

            Il y a un hélico sur le bateau, pour repérer les passes dans la glace et décharger du matériel, plein d’autres usages aussi. Dont la première, dès que la base est dans le rayon d’action de l’appareil, est le courrier et la nourriture fraîche. Salades, tomates, laitages, fromages, viande. Savez-vous que depuis, je mange des tomates et de la salade tous les jours, dans la mesure du possible. J’en rêvais la nuit, là-bas !!!

            Sans compter les fromages blancs et autres produits odorants de nos campagnes.(Fin de la parenthèse)

            Les hivernants se jettent dessus comme des vautours !!! Quand on arrive, on est assez surpris ! Mais après, on comprend mieux, plus tard. On fera pareil. Mais à ce moment, on ne les voit pas, on est encore sur le bateau. Lui, avance comme il peut, plus on s’approche de la base, plus les icebergs sont nombreux, nous, nous sommes restés deux jours à 5 km. Mais on en profite pour se mettre dans l’ambiance, ceux qui avaient le mal de mer se remettent de leur semaine de jeûne forcé, et on photographie à tout va les manchots qui nous sortiront par les yeux bientôt.

           Quand on arrive enfin sur la base, c’est le boulot pour tout le monde, des centaines de caisses à décharger, à déballer, elles ont été conditionnées pour un long voyage en mer, et entre les matériels hautement fragiles, les bouteilles, les caisses de vin, de bière ou autres spiritueux, sans oublier, les demi bœufs congelés, il y a du travail... Du matériel de chantier aussi, et des matériaux. Il faut faire vite, car le temps est très changeant, et on peut passer d’un soleil radieux à un blizzard en dix minutes. Avantage, on ne peut pas dire qu’on va s’arrêter à la nuit tombée... Le vent, c’est la galère, là-bas, c’est même le principal problème. (Je voulais  faire une recherche sur le vent catabatique qui sévit là-bas, et je trouve un site qui explique pas mal le phénomène en terre Adélie, donc lisez-le, si vous voulez.... http://www.meteo.fr/meteonet/meteo/pcv/outremer/adelie/clim_adelie.htm , mais pour faire simple, c’est un vent qui a tout le continent antarctique pour prendre son élan, alors, quand il arrive, ça déménage !!! Et on attend que ça se calme. Un truc que je ne voulais pas croire, avant, c’est qu’on ne pouvait pas respirer quand le vent est trop fort. Ben, c’est vrai. Connaissez-vous un phénomène de physique qu’on appelle  « l’effet venturi », c’est le principe du pistolet à peinture. Une pression d’air devant un goulot de bouteille en fait sortir le contenu. Pour les poumons, c’est pareil, le vent est si fort qu’il en expulse l’air, et que vous avez du mal à inspirer. Et c’est ce qui se passe quand le vent dépasse les 150 Km/h, très courant là-bas, largement plus même.

            Après la page météo, on peut faire un aperçu des hurluberlus qui ont signé pour cette 32ème expédition polaire.

Nous partîmes 28, mais arrivés au début de l’hivernage, nous ne fûmes plus que 26 au port à faire nos adieux aux partants. Je reviendrai plus tard sur ceux-là, qui ne viennent que l’été, tous les ans, bon plan, d’ailleurs. Les deux manquants, les lâcheurs, ont, l’un, décidé de ne pas rester, l’autre, s’est vu signifier son licenciement pour alcoolisme aggravé. Bon début, si ce n’est que l’un est boulanger/pâtissier, l’autre chef de la centrale électrique. Le chef, comme tous les chefs, on peut s’en passer, mais le boulanger, alors, là, il nous a mis dans le pétrin.... (Ouais, bon). On a du apprendre à faire le pain en vitesse, le médecin surtout s’y est collé. Et en plus, comme il devait travailler en symbiose avec le cuisinier, nous avons dû nous organiser pour faire à manger chacun notre tour pour que le celui-ci ait sa journée de congé hebdomadaire...

            Donc, nous voilà 26 , chacun son métier, moitié techniciens , moitié scientifiques. Un chef de base, et comme c’est un territoire français, il est maire, préfet, commissaire, et toutes les charges inhérentes à sa fonction, très théoriques. Il avait tendance à se prendre un peu trop au sérieux, mais c’est une autre histoire. Trois météorologues, un glaciologue, un spécialiste du magnétisme terrestre, deux biologistes, un Shadock qui analyse l’air, un médecin-dentiste-psychiatre-boulanger, dont je vais aussi parler, dans un chapitre que je vais appeler « appendicectomie polaire », ça en jette ? j’ai un trou pour les scientifiques. Y’en a encore. Passons à nous, les manuels. Moi, mécanicien sur les engins chenillés qui nous servent pour nos déplacements sur la glace, et l’île. Trois électro-mécanos pour la centrale électrique, et le bouilleur pour l’eau qu’on doit fabriquer, (si,si, on est dans la plus grande réserve mondiale d’eau douce, mais c’est comme ça, on va pas casser un berg pour avoir de l’eau millésimée, trop complexe). Un plombier, un mécanicien de précision pour réparer les appareils des scientistes, un électricien, un gérant postal, le voilà, le manquant, avec son radiotélégraphiste. A mon avis, maintenant, ça doit être un administrateur réseau. Un ingénieur mécanicien pour nous superviser. Faut que je recompte, maintenant. On est sur place, maintenant, et faut qu’on vive plus d’un an ensemble.

            ....Et maintenant que nous sommes en place, on s’installe dans nos foyers. Nous disposons chacun d’une chambre pas bien grande, un lit, un bureau, une armoire. Bon, pour ce que l’on a à y faire..Ca suffit. La base est composée de bâtiments préfabriqués de type algeco  (chantier) adaptés au climat. Ils sont montés sur pilotis, pour que le vent puisse passer en dessous et limiter les congères. Mais ça ne marche pas toujours. Un pour les chambres, une soixantaine, un pour la vie en commun, réfectoire, cuisine, salon, bibliothèque, garde-manger hebdomadaire. D’ailleurs, c’était mon boulot tous les lundis matin d’aller faire les courses avec le cuistot dans les différents lieux de stockage de nourriture. Plusieurs pour des raisons de sécurité en cas d’incendie, et pour des raisons de température. Un bâtiment reste à 4°C pour les fruits, patates, œufs, tous disposés un par un sans se toucher, pas les patates, elles dans du sable, je crois. Avec les conserves, boissons diverses, des cubis de 50 litres de vin australien, bières et autres. Cigarettes, aussi. Des congélateurs également répartis en plusieurs endroits.

             D’autres bâtiments pour la centrale électrique, mon garage atelier, qui fait menuiserie aussi. Les locaux des scientifiques sont regroupés dans un seul lieu. A part le hangar de lancement des ballons-sondes. Et un peu à l’écart, d’autres constructions servent aux personnels qui ne viennent que l’été, pour construire, ou aménager de nouveaux ateliers. Tiens, je viens de trouver un site perso qui a encore des photos de l’époque, peut-être un  peu après moi http://www.amapof.com/html/taaf/tad/tad_base.html  .Ca donne une idée. Et un autre, tiens, plus global, http://www.transpolair.com/index.htm

            Maintenant, je voudrais revenir sur l’étonnement  des gens à propos de la possession de la terre Adélie.  Si vous regardez une carte de l’antarctique, vous verrez que cette région ressemble à un quartier de brie (pas un camembert, c’est trop petit ). Si vous regardez la portion australienne, c’est beaucoup plus conséquent. C’est parce qu’ils ont pris les extrémités est et ouest et ont tiré un trait jusqu’au pôle. Mais c’est assez théorique, tout le monde peut y venir, s’il respecte le traité .

            Le continent antarctique est le seul continent qui échappe à la juridiction classique des États. Après des débuts de revendication territoriale par tel ou tel État riverain de l'Océan austral ou conquérant de ces espaces vierges, le traité sur l'Antarctique conclu à Washington le 1er décembre 1959 a conféré à ce continent un régime international unique en son genre. Le traité, conclu entre tous les États qui avaient exprimé des revendications de souveraineté en Antarctique (Argentine, Australie, Chili, France, Nouvelle-Zélande, Norvège et Royaume-Uni), et les États qui refusaient de reconnaître ces revendications (États-Unis, Russie, Japon, Belgique, Afrique du Sud), est considéré comme ayant «gelé» ces revendications (article 4 du traité). Il a institué un régime de coopération internationale original qui place à égalité tous les États parties, qu'ils soient possessionnés ou non.

Le continent antarctique est à la fois un espace vierge, témoin d'équilibres naturels encore très peu affectés par les activités humaines, une source de mémoire du climat mondial dans ses neiges et ses glaces, un point d'observation irremplaçable pour certains phénomènes atmosphériques ou climatiques, et un milieu extrême dans lequel la vie a pu néanmoins s'adapter. La prise de conscience des enjeux essentiels que représente ce continent au regard de l'environnement mondial, malgré son éloignement, a donné lieu à la signature à Madrid, le 4 octobre 1991, d'un protocole au traité, relatif à la protection de l'environnement.

Une première tentative de réglementer l'exploitation des richesses énergétiques et minières en Antarctique dans le cadre de la convention de Wellington sur la réglementation des activités relatives aux ressources minérales de l'Antarctique ouverte à la signature le 2 juin 1988 se solda par un échec. En revanche, la convention de Londres pour la protection des phoques en Antarctique, signée le 11 février 1972, et la convention pour la conservation de la faune et de la flore marines de l'Antarctique adoptée à Canberra le 20 mai 1980 témoignent de la volonté de soumettre ce continent à une protection internationale forte. Le protocole de Madrid consacre cette évolution en faisant de l'Antarctique, selon la déclaration liminaire solennelle, «une réserve naturelle, consacrée à la paix et à la science».

            J’arrête les  détails que vous trouverez sur n’importe quel site. La France « possède » les TAAF (Terres austales et antarctiques françaises), qui comprend quelques archipels et îles pas vraiment fréquentables. Kerguelen, Amsterdam, Crozet, ne sont que des cailloux battus par les vents. Et habités par les scientifiques, comme en terre Adélie.

            On revient à la base avec moi, hop !

            A peine arrivé, on m’annonce que j’ai du boulot sur le continent, à une dizaine de km. On y va en hélico, tiens ! Première fois. Et mon job, c’est de redémarrer les engins stockés depuis un an. Surprise, on arrive, rien ne vient perturer la beauté du plateau blanc.... Des fanions de différentes couleurs, c’est tout. Ah, c’est pour ça qu’on est venus avec des pelles ? Ben oui, il faut creuser. D’abord, une caravane apparaît, pour l’abri, pas celles que vous voyez à la Baule, évidemment. Puis un bulldozer, ensuite est dénneigé, il faut s'aménager une rampe. Ensuite, avec lui, ça va plus vite. Des HB40, engins chenillés et d’autres caravanes, et nous voilà près, au bout de 3 jours, à partir en expédition de forage glaciologique. Durant ces trois jours, j’ai appris quelques trucs sur le camping polaire. La première chose à préparer, un igloo/wc. Ensuite, on ne met pas le chauffage dans les caravanes, pas tout de suite, la condensation mouille tout et ça dégouline de partout, donc, on dort à température ambiante. La chose à ne pas faire : se déshabiller dans les duvets et laisser ses affaires dehors ! c’est du bois le matin ! Donc, on se déshabille dans les plumes et on pousse les fringues au fond. Et on a pris ses précautions urinaires....

            Après quelques jours de séchage, on peut aménager un abri chauffé. Mais quand on creuse, avec le soleil, sans vent, la chemise est suffisante, et surtout les lunettes de soleil. Même motif qu’aux sports d’hiver. Sinon, gare.. Alors, voilà les glaciologues qui arrivent et vont faire des trous.

            J’en ai visité un,(de trou) après, hé bien, c’est joli tout plein, avec des cristaux sur les murs. Il suffit de ne pas denneiger une  caravane, mais de creuser un tube vertical d’accès. Puis là de creuser une pièce de travail pour les carottes. Vous êtes à l’abri, et la température reste à 0°. Tip-top.

            Mais je n’en fais pas partie, je repars vers le confort de la base...

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Retour en arrière....

...Juste un peu, car c’est en relisant que cela m’est revenu. Je vous ai dit que c’était un peu en vrac ? Ben oui, comment j’ai fait pour partir là-bas ? Et pourquoi ? Je ne vais pas revenir au berceau, mais sachez que mon père travaillait à Air France. Lui était casanier à mort, dommage.

 Mais, dès mon plus jeune âge, j’ai pris l’avion, comme on prend le bus, je voyageais seul à 7 ans, sans ma pancarte, et à 12 je suis allée encore seul à La Paz, Bolivie. On m’attendait là-bas, quand même...

 ......Puis, toutes mes vacances se passaient aux Etats-Unis, j’allais même parfois à New York pour le week-end, chercher des pièces d’électronique pour papa. A l’époque, 150FF A/R. Il bricolait dur. En plus, comme je pouvais pas réserver, je voyageais en première, si y’avait pas de place en économique. Ca a bien changé...

... Tout ça pour dire que je m’étais habitué à voyager pas cher. Mais à la fin de mes études supérieures, après le CAP :’-), je n’avais plus droit à ces quelques avantages. Et je me suis dit que le meilleur moyen de voyager était de bosser à l’étranger. Donc, c’est ma mère qui m’a trouvé cet engagement. Et comme l’école d’où je sors fabrique les meilleurs mécaniciens de chantier du pays, (EATP, Egletons, Corrèze), merci mes chevilles, et que j’ai été le premier sur la liste, me voilà embauché au siège des Expéditions Polaires Françaises, sises à l’époque près de Bois de Boulogne, en face de l’ambassade soviétique, (à l’époque aussi).

C’était en mars, départ prévu en décembre.

            Je me suis donc familiarisé avec les engins, mes futurs coreligionnaires également. Avec leurs propres méthodes. Les scientifiques, je ne les ai vus que très peu de temps avant le départ. Des stages aussi dans des entreprises qui envoient du matériel là-bas, Volvo Penta pour une barge de débarquement qui a vécu deux « jours » à la base. Un iceberg s’est retourné à proximité, cela arrive souvent en été, et la vague provoquée a projeté  celle-ci contre les rochers, en la pulvérisant.

            Autre stage, différent, à l’hôpital militaire de Versailles. J’ai obtenu à l’école, et gardé d’ailleurs à jour mes connaissances de sauveteur secouriste du travail. On m’a proposé un stage d’anesthésiste afin de pouvoir aider le toubib en cas de problème grave, ce que j’ai accepté, évidemment. Et voilà un mécano déguisé en interne dans les salles d’opération !!!! J’ai appris deux/trois choses, mais le but du jeu était de savoir si je ne tombais pas dans les pommes quand on dépiautait un gaillard. Donc, quelques bidasses opérés, des bricoles, et aussi une fille de commandant, je me rappelle, une hernie cruciale. Elle me regardait, pas rassurée, jolie, heureusement qu’elle ne m’a pas demandé mon métier !

............Et donc, tout ça pour arriver à un chapitre dont j’avais parlé, je crois, appendicectomie polaire, puisqu’un des météos a eu une crise d’appendicite là-bas. Dans la minuscule salle d’opération de la base qui n’avait jamais connu ça, nous avons fait l’ablation de cette petite chose. Mais ce qui est bénin ici, et qui prend 10 mn dans n’importe quelle salle d’op, a pris des dimensions de première mondiale, là-bas. On n’était pas fiers....je vous assure. Le plus optimiste était le patient. D’ailleurs, il se porte très bien, je l’ai revu il y a 3 ou 4 ans. Et il est toujours à météo-France.

Donc, vous savez tout de mes raisons et motivations.

J’étais très motivé, et même si je vivais en concubinage, ma compagne n’était pas (du tout) d’accord, mais bon.

            Elle m’a soutenu jusqu’à mon retour en Australie, et quand je l’ai appelée de là-bas, à la fin, elle m’a dit, « prends ton temps pour revenir, y’a quelqu’un d’autre, ». C’est sympa, car elle m’aurait dit ça pendant l’hivernage, j’aurais pété un plomb, sûr ! Ca lui a peut-être été conseillé d’ailleurs, dans les sous-marins aussi, lieux d’isolement par excellence, les mauvaises nouvelles ne sont pas transmises aux gars.

Je me suis un peu éloigné de ma base, aujourd’hui, mais j’y reviendrai. Je ne connais pas encore le sujet, si vous avez des questions....écrivez-moi .

            Mais je ne veux pas non plus que ça ressemble à un exposé, non, il m’est arrivé plein de trucs. Ah oui, ça me revient, maintenant : bloqué 3 jours par un blizzard à 500 m de la base, bronzette avec un phoque de Weddel, baby-sitter d’un bébé manchot empereur, entre autres.

....Je n’ai pas un souvenir très précis de la période d’été, on est pressés de voir partir tous ces "parasites"(sans malice ni méchanceté) qui nous empêchent de faire ce qu’on veut. Qui bouffent nos réserves, ça je m’en souviens, je me disais  « ils peuvent pas nous laisser les fruits, ces c... ». En fin de compte, je crois que je les enviais, car c’était le plan idéal. Un aller/retour payé trois mois par an en Australie, génial...

            Cette période est parfaite pour tout ce qui est travaux extérieurs, aménagements, entretien et autres. Il fait encore jour tout le temps, et ce, jusqu’en mars. Ça n’empêche pas les blizzards, la période d’été est un euphémisme pour dire que les températures ne sont preque jamais inférieures à-10° pendant cette période. Ce ne sont qu’expériences et analyses en tout genre. Sur la biologie marine, le magnétisme terrestre, (on est au pôle sud magnétique). Les poissons, les manchots et la glace. En fin de compte, c’est à cette période que se font les choses les plus intéressantes pour les scientifiques. D’ailleurs, on ne nous embête pas beaucoup, notre rôle sera de tenir la base en état pour leur retour.

            En attendant, on fait notre job, celui pour lequel on nous a fait venir. Moi, ça me va, sauf que ces engins de la dernière guerre, ça fait bizarre. Weasels, fouine en anglais, des engins de débarquement chenillés à bande de caoutchouc et dont le poids et la pression au sol en font le véhicule idéal pour la glace de mer. Un homme normal exerce une pression de 750 g/cm² sur le sol. Ces engins étaient prévus pour les marécages ou les bocages normands, la boue ou autre inconvénient gênant pour la progression des troupes. Leur pression au sol est de 250 g/cm². Là où vous vous embourbez jusqu’à la taille ou que vous traversez la glace, il passe. C’est pourquoi PEV (Paul-émile-Victor) les a récupérés, et que depuis, on les retape. Mais comme je l’ai dit précédemment, ils ont fini par acheter des dameuses, encore mieux.

            Moi, ça m’ennuyait pas mal, ces engins, mais je n’étais pas venu pour eux. Les quelques centaines de mètres très dénivelées et accidentées les faisaient décheniller souvent et ça m’énervait, évidemment, ne peuvent pas marcher, ces fainéants !!! A lors, j’allais réparer, j’avais même fabriqué un outil pour remettre la chenille tout seul, parce que les fautifs étaient partis, à pied, ce coup-ci, à la cafétéria, (c’est la même baraque que le restaurant/cantine/bibli/cuisine/vidéothèque, mais ça change de nom suivant l’heure et l’usage.) Et  surtout, la neige qui recouvre tout en hiver n’est pas encore là. C’est beaucoup plus confortable avec. Et moins pénible pour les engins.

            Sinon, le temps passait vite quand même, à ce moment, on s’est aperçus aussi qu’on mangeait fort bien, que les viandes australiennes étaient délicieuses, leurs vins aussi. Le moindre anniversaire était sujet à un repas de fête accompagné de gâteaux et champagne. Un bon plan, je vous dis, pour les rusés qui arrivent à se faire envoyer là-bas. Un exemple, l’hélicoptère, une Alouette II, fait partie du voyage. Accompagnée de deux pilotes et deux mécaniciens, tous dépêchés par l’armée. Et les trois mois leur valent une année de machin-retraite. On a le même exemple avec les enseignants mutés à Cayenne ou Nouméa. Mais les places sont chères. On hérite du haut du panier, du coup. Faut pas se planter quand un de ces fameux catabatiques se lève.

            Alors, un jour, ils sont partis, tous, l’hélico, le bateau, les touristes. Ah, c’est vrai, on a eu droit à des touristes en plus, une journée ou deux, mais ils ont été très mal reçus, ça nous a pas plu, pas du tout. On n’est pas au zoo. Ils ont payés à l’époque plus de 10.000 $ pour leur croisière. Pfouou !!! Du vent ! En cherchant autre chose, je m'aperçois que c'était le Lindblad Explorer, mais, y'a quand même un tampon postal en cet honneur.Il y a eu aussi un garde-côtes américain, le Polar Star et un allemand, l'Explora, stop!!!

            C’est marrant, pendant l’été, les manchots adélie aussi sont là, mais eux, depuis des millénaires, et sur le même caillou. Quand ils repartent, c’est l’heure aussi pour les estivants. Je vais parler d’eux, un peu, c’est leur territoire après tout.

            D’abord, on a deux sortes de manchots et ils viennent chacun leur tour, en terre Adélie. Le manchot adélie en été et le manchot empereur en hiver. Ils se croisent, en quelque sorte, mais, ils n'utilisent pas les mêmes territoires...Les adélie restent sur la roche, et reviennent au même endroit de nidification, et les empereurs sont sur la banquise. C'est plus propre.

L’adélie est l'espèce la plus abondante et la mieux distribuée, très curieux il peut s'approcher très près des visiteurs. La particularité décorative la plus distincte, ce sont ses yeux cerclés de blanc qui tranchent sur le noir absolu de sa tête. Les manchots Adélie vivent aux alentours du pôle sud sur le continent Antarctique et les îles environnantes.

 Il y a très peu de différences entre le mâle et la femelle, le premier est un peu plus gros et son bec plus grand. La plus grande partie de l'année se passe en mer, mais au début de l'été polaire, soit vers le mois d'octobre, ils regagnent la terre où ils se sont accouplés l'année précédente. C'est même souvent l'endroit où ils sont nés eux-mêmes. Les mâles arrivent quelques jours avant les femelles. La glace qui n'est pas encore fondue rend la tâche de se rendre sur terre parfois difficile, et ils peuvent parcourir parfois plus de 60km. Le trajet peut durer plusieurs jours. Ils avancent alors à la vitesse d'un pas d'homme qui marche dans la neige molle. Ils voyagent en groupe. À leur arrivée, les mâles doivent souvent se battre à grand coup de bec pour récupérer leur place. Les femelles arrivent par la suite et les mêmes couples se reforment d'année en année, et souvent pour la vie.

L'acte sexuel est généralement précédé de la parade amoureuse pour les nouveaux couples. Le nid est exclusivement fait de cailloux.(Ben tiens, évidemment, où que ’t’as vu de l’herbe ?) Les 2 semaines de novembre la femelle pond 1 ou 2 oeufs dans une intervalle de 1 à 4 jours, le mâle couve alors l'œuf, jeûnant 3 semaines environ pendant que la femelle retourne en mer chercher la nourriture. A son retour elle couve 1 semaine pour que monsieur aille se nourrir à son tour ensuite, ils alternent jusqu'à l'éclosion. Ils n'ont pas trop à craindre pour eux  sur la terre ferme, mais sont attentifs aux oeufs car, les skuas les adorent, (sorte de goélands). Après 3 semaines, les poussins peuvent quitter le nid sans toutefois se débrouiller seuls. Les parents se reconnaissent par leur cri unique. Vers la fin février, début mars, la famille regagne la mer. D'autres nouveaux prédateurs les attendent, les léopards de mer et s'en prennent aux plus mauvais nageurs.

Ils se nourrissent de crustacés, de petits poissons, de krill qu'ils vont chercher à une profondeur de 75 mètres environ. Ces oiseaux partagent tout en groupe. Ils se déplacent ensembles, s'accouplent, se reproduisent, élèvent leurs petits, voyagent dans les mers et tout ça avec des milliers de congénères. Ils se serrent les uns aux autres pour se tenir au chaud. Ils découragent les prédateurs en restant toujours en groupe. Ces prédateurs sont : les léopards de mer et les épaulards. Mais ceux-ci attaquent rarement un groupe, ils attendent qu'un d'eux s'isole.

En été, la base.

            Bon, ce que vous venez de lire en italique, c’est le machin pour les écoliers, ce qui est dit est vrai, mais sinon ce sont de vrais teignes : 70cm de haut, 5kg tout mouillé, plutôt 4. Et c’est vrai qu’on les enquiquine pas mal. D’abord, on débarque chez eux, sans payer de loyer. Heureusement, ils sont inbouffables, sinon, y’en aurait plus. Ce sont des paquets de muscles, et leur peau est inutilisable pour les fourreurs (évidemment, ce sont des plumes !). Sur la base, en été, y’en a environ 5.000, je dirais. Peut-être plus, mais ils vont et viennent. Et si par malheur, vous croisez leur chemin, attention aux coups de bec. Ca fait mal. Et ils font un bruit !!!!!, alors, là , chapeau ! Infernal. L’avantage de nos baraquements, c’est que nous avons des triples vitrages. Heureusement. Et j’en rajoute, en été, la température se retrouve parfois positive. Et quand les déjections de tout ce cheptel se met à fondre, attention les odeurs. !!!! Vous convenez  que ce n’est pas le paradis....Mais ce sont des parents formidables, en deux mois à peine leur petit devient plus gros qu’eux avec son duvet. Et il ne peut prendre la mer avant que celui-ci soit totalement parti et remplacé par la couche isotherme qui constitue leur protection. Alors, ils attendent. Pas trop, ils partent si le bébé n’est plus viable, le ménage sera vite fait. Les skuas, nous, on les appelait comme ça, sont là, ils sont carnivores. A moi, ils font penser à un gros épervier aux pattes palmées. Ils se nourrissent d’œufs et de poussins, vivants ou morts. Dangereux. Même pour nous, attaquent parfois. On s’amusait à leur donner à manger de la viande en tendant la main (gantée) bien haut. Et quand notre petit téléphérique qui emmenait les déchets jusqu’à la mer se mettait en route, le bruit les faisait venir par dizaines. Comme les mouettes au-dessus des chalutiers.

            Le Manchot empereur est le plus grand de tous les manchots, il mesure environ 1 m de hauteur et pèse de 20 à 45 kg. Cet oiseau, adapté aux climats très froids, vit le long des côtes de l'Antarctique et dans les mers environnantes. Il se reproduit pendant la longue nuit de l'hiver antarctique, les individus se réunissant en énormes colonies durant les mois d'avril et de mai.

            La période de parade nuptiale commence par l'apparition de brillantes taches orange près des oreilles. Le Manchot empereur ne bâtit pas de nid ni ne définit de territoire. La femelle pond un unique oeuf. Dans les heures qui suivent, le mâle installe cet oeuf dans un repli de son ventre, une sorte de poche située au-dessus des pattes, et il le couve. Après avoir pondu son oeuf, la femelle reprend le chemin de la mer pour s'y nourrir. Elle revient deux mois plus tard, au moment de l'éclosion, pour nourrir et élever le petit.
Le Manchot empereur se nourrit de poissons et de calmars qu'il attrape dans son bec très coupant en nageant sous l'eau. Pour se protéger du froid, des adultes et des petits se blottissent les uns contre les autres.Ils adoptent une méthode en escargot, ou tortue, les uns derrière les autres, enroulés et avançaant doucement vers le centre.De cette manière, chacun son tour est à l'abri pendant un moment et la température de chaque individu peut être sauvegardée.Dans la poche sous-ventrière où se trouve l'oeuf, celle-ci ne doit pas déscendre en dessousde 40°C, et il fait souvent -40°C sur la banquise.Ils sont donc très différents de leurs cousins adélie, tant par leur physique magnifique, que par leur comportement plutôt peureux.On les a embêtés aussi, ceux-là.Pour savoir ce qu'ils mangent, le biologiste leur faisait un gavage à l'eau et après leur faisait les pieds au mur pour vomir, les pauvres!!! l'a plus qu'à se retaper la route pour refaire les courses.Les manchots déglutissent leur nourriture pour nourrir leurs petits.Je ne crois que j'ai déja parlé mon essai d'adoption d'un bébé empereur, trouvé lors d'une balade dans une rookerie(c'est comme ça que s'appelle la colonie).Ca ne pouvait pas être concluant, de toute façon, mais je me devais d'essayer.La mortalité infantile chez les empereurs atteint, je crois, les 30%. C'est quand même le seul animal qui attend l'hiver antarctique pour se reproduire!!! Alors, avec mon Pipiou, comme je l'ai nommé presque tout de suite, dans mon blouson, je suis revenu à la base.

            Et là, commença pour moi, 15 jours assez chargés.Vu la méthode employée par les parents pour nourrir leurs petits, je me suis dit que le meilleur rmoyen de le nourrir était d'adopter la même.Je préparais donc une bouillie constituée de poissons cuits, d'huile de foie de morue, la mettait dans ma bouche et la redonnait au bébé. Il aimait ça, le bougre, mais c'était très souvent, je comprenais maintenant pourquoi ils grossissaient si vite!.Je l'avais mis dans ma chambre pour être plus au chaud, et je l'emmenais pour bosser au garage.Une particularité des manchots est de faire leurs besoins sur place, sans bouger. Et alors? Ben , ils sont obligés d'évacuer leurs besoins loin du nid! Et alors? Alors, ils lancent un jet de matières à deux mètres, j'avais pas prévu ça. Et il m'en a fait des dégats.Plus le bruit.Il demandait sa nourriture très efficacement Mes voisins m'ont demandé de le laisser dans le garage, ce que j'ai fait. Le problème, c'est que dans le garage, la température est glaciale au niveau du sol. Je l'avais mis en hauteur et il a du vouloir se balader.Il est tombé et quand je suis revenu le matin, il était mort de froid. Mais comme je l'ai dit, c'était un sursis pour lui, je n'aurais pas pu le rendre viable et le nourrir jusqu'à jusquà la fin de sa croissance et de sa mue.Mais ça m'a fait de la compagnie durant 15 jours. Enfin...snifff!!!! un souvenir sympathique.

 Arrivée de l'empereur

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J’en étais à nos poubelles et nos skuas qui faisaient les éboueurs. On a beaucoup de compagnie, là-bas, quand même, les manchots  adélie par milliers pendant l’été austral, et les empereurs durant l’hiver. Ca, ce sont les plus connus, on a beaucoup d’autres oiseaux, car ce sont des oiseaux, je n’apprends rien à personne, n’est-ce-pas ? Il y a des pétrels géants,pétrels des neiges, et d’autres dont le nom m’échappe. Enfin, plein.

            Il y a les phoques de Weddel, gros patapoufs très sympas, on peut s’asseoir dessus, tu penses ! Bon, ils râlent un peu, mais pas méchamment. Ils sont là, à bronzer sur la glace de mer, un trou pas loin, pour aller grignoter un poisson de temps en temps, et voilà, si le vent se lève, on retourne à l’eau. On a assisté à pas mal de naissances (et d’accouplements aussi, mais bon, on va pas s’étendre là-dessus.... , surtout que de ce point de vue-là, on n’était pas au top, mais on regardait, des fois qu'on se rappelle plus en rentrant,hihi!!!!).

 

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Mais il y a une autre sorte de phoques, aussi, pas du tout pareils, le léopard des mers, on l’appelle.

            Sale bête !!!! Il mange de tout, ce cochon, surtout les manchots. Lui, on ne l’approche pas. Il a une drôle de technique pour attraper les manchots,qui, quand ils sont sur la glace de mer,( la mer gèle à -1.8°), sont visibles d’en dessous à contre-jour. Le fourbe affamé J les suit jusqu’au moment où ils plongent. Après, ils font mumuse avec leur victime comme un chat avec une souris, ils les jettent en l’air et après avoir fait ça plusieurs fois, ils les croquent , gloup ! Ou alors, c’est pour les ramollir, car c’est vraiment inbouffable, je l’ai déjà dit. Voilà pour quelques animaux de la ferme.

 

 

Nous, on vit notre train-train, Les horaires sont à notre bon plaisir, du moins pour moi. Sinon, il faut des quarts de veille pour la centrale électrique qui nous fournit l’électricité et l’eau douce. La plus grande réserve d’eau douce du monde ne nous sert à rien, elle est gelée, les immenses icebergs tabulaires que nous voyons autour de nous, sont trop gros, la méthode serait bien hasardeuse d’aller récupérer de la glace pour la faire fondre. Alors, on utilise le système d’évaporation de l’eau de mer, qui nous donne de l’eau distillée, à laquelle nous rajoutons des sels minéraux. L’eau est pompée à 1500 m de la centrale et remontée par un système de pompes. Parfois des algues bouchent l’aspiration et il faut alors souffler de l’air comprimé dans la tuyauterie pour dégager. Cela rapidement avant que l’eau ne gèle dans le tuyau, celle-ci étant immobilisée.

Notre roulement à la cuisine aussi. Steak-frites, ce jour là. On ne va pas s’embêter. La viande, je vais la chercher avec un de mes weasels, et le cuistot. Des congélateurs sont à plusieurs endroits de la base. On rentre et on tombe la veste dans ces grands congèls ! Il fait meilleur que dehors, souvent. Je prends ma grande scie à bois et je coupe un quartier de bœuf en deux. Un demi-bœuf par semaine.

Entre-temps, je répare les engins de la base, entretien, relax. Et je vais chercher le chef de base quand celui-ci déchenille, ce qui lui arrive souvent à ce con.

Je prépare aussi la réfection d’un de ces weasels pour la relève. On en refait un par an, comme ça depuis 30 ans.

Pendant ce temps-là, les jours raccourcissent, le froid devient plus vif, les blizzards plus fréquents. Le vent souffle à plus de 250km/h assez souvent. Il faut se méfier.

            En antarctique, la grande fête, c’est le 21 juin, car c’est la midwinter, le milieu de l’hiver, la période où les jours sont les plus courts de l’année. Le soleil à cet endroit du globe n’est jamais au zénith. L’été, il fait le tour de l’horizon sans jamais se coucher, et petit à petit, il plonge et ressort un plus loin vers l’est. Et un jour, il ne sort plus. Juste une lueur vers 11h jusqu’à 13h, (heure de Paris, on s’embête pas avec ça, aucun fuseau ne correspondrait, de toute façon.) C’est pour ça qu’on se balade avec une torche et qu’il y a des lignes de vie, le long des passerelles, un câble à suivre, la nuit, sans lampe ou en  en cas de blizzard, on ne voit rien.

Donc, ce jour spécial, c’est la fête, un spectacle est organisé, de la musique, on avait un groupe de rock, les Sea-Truck, ils s’appelaient.(En souvenir de la barge de débarquement qui avait été détruite, à peine débarquée. Un iceberg s'était retourné à proximité, et la vague l'avait projetée plusieurs mètres plus loin). Des sketches, plein de trucs, et un repas pantagruélique, accompagnés d’alcools et de vins australiens. La débauche complète.

            Nous sommes là depuis maintenant 6 mois et la moitié n’est pas faite. Il faut se défouler avant de péter un câble. Je pense d’ailleurs que cette fête a été inventée par les premiers hivernants du début du siècle, c’était sûrement beaucoup plus difficile à vivre. En plus, la plupart du temps, ces gars-là n’avaient pas demandé à hiverner, leur bateau s’était fait bloquer par la glace. Les voiliers sont tributaires du vent, et bon !!! Je ne vais pas me lancer dans la marine à voile époque Endaevour, un bateau polaire.

           

            Cette période n’est pas faite pour les balades, on les a faites avant, dés que la température a gelé la mer et rompu l’isolement de notre île de 800 m sur 400. On a visité des icebergs, l’intérieur est creusé par la mer, et ça fait des cathédrales gigantesques à l’intérieur, bleutées, très jolies. Mais dangereuses, car tout ça flotte quand même,  bouge, craque et s’effondre de temps en temps. Mais quand on fait ces balades, c’est qu’il fait beau, et quand il fait beau, ça caille. -30 et c’est parti. On s’équipe, je fournis la machine et on fonce à tombeau ouvert, sur la glace, les chenillessont équipées de crampons pour ne pas faire des glissades trop aléatoires. Il y a des phoques par ci, par là. Elles sont pleines, c’est des gonzesses phoques, on les reconnaît aux cils, ooooh, je rigole !!!. On est bien sur la banquise quand il fait beau, il ne fait pas froid, nous sommes maintenant habitués. Je me suis souvent baladé en short et tee-shirt par -15, pas deux heures, bien sûr, mais pour aller d’un bâtiment à l’autre, pas de souci.

            On fait de la photo, c’est là que j’ai appris à développer mes films, noir et blanc, et couleur; j’en ai passé des heures dans la chambre noire, ça me bottait, ça !

            De la vidéo, aussi, j’avais acheté une caméra vidéo, avec un magnétoscope portable. Une fortune à l’époque 17000FF. Les caméscopes n’existaient pas et j’avais du inventer un système pour pas geler mon matériel. Il fallait ensuite que je le laisse dans le sas où nous laissons nos vestes et grosses chaussures, pour éviter la condensation. Mais ça marchait... Pas longtemps, la batterie avait du mal avec ce froid à entraîner les mécanismes du magnétoscope, j’avais fait aussi une rallonge pour mettre la batterie dans une poche..C'était mal vu à l'époque, on m'avait interdirt de l'emmener sur le continent, monopole des photos et films, je pense.

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Depuis, les progrès de la science ont simplifié la chose.

            Question balade, j’en aurais d’autres à raconter, en particulier un certain 14 juillet où j’ai voulu aller hisser le drapeau français en haut du mât ionosphérique, une antenne de 76 mètres de haut. Je suis parti le 14 juillet, je suis revenu le 17....

En été, quand le soleil toujours présent et la mer dégagée en font une station balnéaire agréable...

 

La dernière fois, je disais que j’avais fait une expédition personnelle et spontanée le 14 juillet.

          Il faisait beau, et froid, je ne sais plus combien, mais à cette période, environ -25°C. Si les bikinis ou monos sont à l’ordre du jour dans l’hémisphère nord, nous sommes, nous, en plein hiver, je le rappelle, des fois que cela aurait été oublié

Un autre détail qui a son importance, le soleil. Il a un cycle de onze années, ce charmant réacteur nucléaire, et l’année pendant laquelle je me trouvais là-bas, était celle-là précisément où monsieur s’énerve. Ce qui nous donna des aurores polaires superbes dues aux orages magnétiques qui déferlent sur la planète. Et nous sommes au pôle magnétique, une région du globe qui n’est pas fixe comme le pôle géographique, lui à la rencontre de tous les méridiens. Donc, le soleil nous faisait part de son mécontentement, mais qui nous valaient aussi de belles nuits, heureusement, elles duraient 21 h00, à cette période.

 Une autre ?

Ce fut la raison de ma décision, d’aller planter un drapeau en haut de ce mât ionosphérique qui servait justement à mesurer des données sur la météo, le magnétisme, et occasionnellement de mat radio, tant qu’à faire. Il se trouve à environ ½ heure de marche sur l’île. Il y a un semblant de route, mais l’hiver, ce n’est qu’un souvenir. Donc, je marche sur  les rochers et les congères, descendant vers une des extrémités de l’île où se trouve le mât. La descente se fait sans encombre, et je me dis qu’une halte à la base Marret s’impose. Celle-ci est un vestige des premières expéditions des années 48/58, si mes renseignements sont bons. En Antarctique, aucune humidité ni moisissure ne peut dégrader les choses. Donc, on a là un souvenir assez bien conservé de l’époque c’était réellement des aventuriers qui faisaient ces expéditions.

Et me voilà, furetant par-ci par-là, dans le baraquement, tout en bois, une grande pièce qui sert de salle à manger et une autre de dortoir, ainsi qu’une cuisine et une cambuse. Qui contient des provisions...Tiens, tiens...  Un thermomètre indique -12°C dans la salle. Pas de chauffage en vue, il faudrait que j’allume le poêle. Mais le bois est dehors. J’en suis à mes réflexions quand le blizzard se lève, un de ceux qui secouent tout le monde, d’un coup, sans prévenir, heureusement que j’étais déjà dedans. Une autre fois, j’ai été emmené à plus de 10 mètres par le vent !!!

Quand ça souffle là-bas, ce n’est pas rien! Record mondial enregistré 327km/h. Hé bien, cette nuit–là, et pendant 3 jours, on a eu une moyenne de 250 Km/h de vent. Alors, ma virée s’est arrêtée là. Les provisions ? Justement dans ce cas-là, ça sert. Il y a un réchaud à gaz, mais pas de chauffage, je ne peux pas sortir, la neige a déjà bloqué le sas. Donc, pas de bois. De toute façon, ce n’est pas conseillé, je suis bien équipé, et la condensation provoquerait une humidité tout à fait inconfortable. Donc, me voilà coincé. Un téléphone de campagne est là, un vieux machin mais qui fonctionne, je peux prévenir la base. Qui me dit de ne pas bouger, prends ton week-end, Manu !  Alors, je m’organise, y’a des livres, de vieux sélections du reader’s digest, je me souviens bien de ces trois jours... Le bruit était formidable, comme un train interminable passait au milieu de la salle. Qui vibrait.

Plusieurs fois, au cours de ces trois jours, une accalmie m’a fait espérer sortir. Mais il fallait que je dégage l’entrée, d’abord. Le temps de le faire, et c’était reparti pour un tour. Bon, je ne m’inquiétais pas trop, mais je commençais à trouver le temps long. Jouer aux dés tout seul, ça rend un peu neurasthénique et  j’aime bien être à mes aises, et la température qui n’est jamais monté au-dessus de -8°C, ça commençait à bien faire. Et les boîtes de conserve gelées aussi, tout. Mais je n’emmenais pas de lecture pour aller aux toilettes, comme je le faisais habituellement.:-))

Puis, un « jour » (vu le temps que ça dure) , j’ai entendu du bruit dehors, en plus du vent. Deux camarades d’hivernage étaient en train de dégager le sas. Ouf, « sauvé », j’étais pas en danger, mais bon. J’étais content de sortir. Nous sommes remontés, le blizzard était encore assez fort, et j’ai eu vraiment des difficultés à remonter à la base, du point de vue respiratoire. L’effet venturi dont je parle au début. On suivait notre fil d’Ariane, sans lequel on ne sait même pas où aller.

 Et ce n’était pas fini, les misères ! Je pensais retrouver ma petite chambre, et pouvoir dormir au chaud, non ! Le blizzard avait sévi là aussi , une fenêtre mal jointe et la neige rentre, comme le sable en Afrique, le moindre interstice, et vous remplissez une pièce, voilà ce qui s’était passé. Rien de grave, ni pour mon matériel, ni pour mes documents, tant que ça ne fond pas, ça ne risque rien, il faut faire attention. J’ai donc eu un évènement positif dans cette histoire, on m’a changé de chambre et cette fois-ci, avec vue sur la mer, ou plutôt la banquise, étant donné la saison. Aux premières loges pour voir arriver la relève !!!!

Au fait, la distance à vol d’oiseau entre la base et mon abri est d’environ 500 mètres. Mais je vous assure que c’est suffisant pour se perdre dans ces conditions et y rester.

  

 Base vue d'hélico, avant la destruction de l'île du Lion pour la piste d'atterissage, texte à venir...

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Ah, ça fait du bien de retrouver un peu la civilisation!

            Et même si la vraie, celle à laquelle on pense habituellement, le métro, les embouteillages, la ruée à quatre roues du week-end ou des vacances, si elle se trouve à une distance respectable, c'est tout de même agréable de revoir les potes et la popote chaude! Je me suis donc remis au boulot, et aussi, à faire mes lettres et timbres des TAAF, entre autres activités adèliennes, si on peut dire...

Je n'en ai pas encore parlé de ça...tiens!

            On nous bassine en partant que la philatélie est une activité hautement lucrative en terre Adélie, et qu'il est de bon ton et même recommandé d'investir dans l'achat de timbres de toutes sortes, d'enveloppes, et de planches complètes, même. Tout ceci dûment tamponné par le gérant postal, lui seul habilité à ce genre d'exercice. Alors, nous avons acheté des timbres, et tout l'attirail complet du philatéliste convaincu: des boîtes à chaussure et une éponge... On peut, aux Taaf, avoir des cachets de la poste toute l'année, c'est-à-dire que même les jours fériés peuvent être tamponnés! Allez donc trouver un cachet du 1er Janvier ou du 14 juillet, y'a pas, en métropole.Pour faire bosser un postier un dimanche ou un jour férié, faut lui mettre un fusil sous le menton!!!

            Ohhhhhhhh, je plaisante, bonjour au gérant TA32, d'ailleurs, J.Claude Béchade, je crois. L'empereur du tampon. On a fait des collections à l'année, par thème, bateaux ou explorateurs. De tout beaucoup, bien casse-pied, mais on était motivé, tu penses, doubler la mise, même plus. Un bon plan!

            Et, maintenant, vingt ans après, j'en fais quoi de mes enveloppes timbrées ? j'ai encore plein de courrier comme celui-là à faire...

            Les philatélistes sont submergés de courrier de ce genre. L'avantage, c'est que je peux encore les montrer à mon fils, parce que sinon, il ne reste pas grand-chose de cette période, de concret, je veux dire. Mais les souvenirs, c'est pas mal, aussi. Même si je ne garde que les bons. Les mauvais souvenirs, quand on les garde, c'est pour une autre raison.

Cliquez sur le timbre pour agrandir


Ile rasée, le lion est parti.

            Il y a donc longtemps que je suis parti de cet endroit assez particulier, magique au début, mais c'est comme tout, au bout d'un moment, on s'en lasse. Et même, vers la fin, les privations, l'éloignement, le désir de voir de nouvelles têtes commencent à peser.En partant, je m'étais dit que jamais je ne remettrais les pieds là-bas, ce qui s'est produit, mais je ne dis pas que je n''y referais pas un tour...Pourquoi pas..

.Et depuis, beaucoup de choses ont changé, les communications, les hommes, les femmes, maintenant, sont présentes, aussi. Même si je ne suis pas toujours d'accord avec le progrès ou l'évolution des choses, je dois avouer que c'est un grand pas. Quant à la sérénité au sein de l'équipe d'hivernage, là, je n'en suis pas persuadé.

.............Je repense à une anecdote qui nous est arrivée vers le milieu de l'hiver. Nous n'avions pas de téléphone, là-bas, les messages hebdomadaires, des telex de 200 mots, si mes souvenirs sont bons.C'est tout ce que nous avions pour communiquer avec notre famille. Ceci par radio, en passant par Kerguelen. Bon, passons. Egalement, parfois, suivant les conditions atmosphériques, on pouvait communiquer avec des radios-amateurs du globe. Un jour, le radio, le plombier de la base était avec lui, arrive à capter l'emission d'un gars de Marseille, et ils font causette, vaille que vaille, quand l'idée leur vient de demander à ce marseillais d'appeler la future de ce plombier, (ils se sont mariés à son retour, d'ailleurs). Ce qui fut fait, et à la grande surprise de celle-ci, ils ont pu bavarder un moment par ce procédé. Jusquà ce que la liaison soit arrêtée par les conditions météo. Il était sur son nuage, notre tuyauteur !!!! Seulement, nous étions, nous, vachement frustrés, moi, ça m'a foutu un cafard terrible, en tout cas. Alors, je me disais que dans ces circonstances particulières d'isolement, il valait mieux être tous à la même enseigne sur ce sujet. Mais je ne suis pas à leur place, ce qui m'aurait été difficile ne l'est peut-être pas pour eux. Ils ont dû adapter leurs tests,afin de garder les moins libidineux d'entre eux (elles)........ hihi !!!

.........Et normalement, la durée de la période d'hivernage aurait du se réduire comme peau de chagrin, si la piste d'atterrissage avait tenu ses promesses.Mais tout ne se passe comme on veut , là-bas, les conditions météorologiques sont parfois TRES exceptionnelles.La mission TA32 fut la dernière à voir l'île du Lion intacte, avant que les dynamiteurs et les engins ne rasent celle-ci. Je ne reviendrai pas sur les polémiques que cela a provoqué, les manifestations de Greenpeace en faveur des manchots qui nidifiaient à cet endroit depuis des millénaires.Les coûts phénoménaux engagés pour cette opération furent un gachis. Cette piste devait normalement permettre de ravitailler la base depuis la Tasmanie ou l'Australie. Pour cela, il faut une piste pour gros-porteurs. Elle a été construite, à grand renforts de moyens techniques et surtout explosifs, mais n'a pas tenu un hiver .Maintenant, elle sert juste pour les petits avions qui peuvent aller jusqu'à la nouvelle base Concordia, anciennement dôme C, où l'epaisseur de la glace atteint 5000 mètres.

Un article de la cour des comptes montre la légèreté de l'enquête de faisabilité de l'ouvrage:

- LA PISTE AÉROPORTUAIRE DE TERRE ADÉLIE

La construction d'une piste d'atterrissage en Terre Adélie, envisagée dès l'année 1965 puis entreprise en 1981, visait à la fois, selon ses promoteurs, à souligner la souveraineté française sur cette partie du continent antarctique et à faciliter la desserte et l'activité de la base Dumont d'Urville installée sur l'île des Pétrels.

L'opération, consistant en l'implantation de l'infrastructure sur des îlots proches de la base, a été engagée dans la confusion. La divergence de vues entre le ministère de la recherche, le ministère des départements d'outre-mer et l'association "Expéditions polaires françaises" a entraîné l'absence de toute décision administrative officialisant l'investissement et son financement. Il a fallu, en effet, attendre la fin de l'année 1987 pour que soient définis les modalités d'exécution du projet ainsi que le montant (100 millions de francs, coût global in fine 110 millions) et l'origine des fonds publics à engager. Les travaux, qui constituent à coup sûr une prouesse technique compte tenu de la latitude géographique, se sont ensuite déroulés durant plusieurs campagnes d'été pour s'achever au cours de l'été austral 1993-1994.

Mais dès l'année 1987, un arrêté interministériel classait notamment les colonies de manchots et de pétrels, situées à proximité de la piste, parmi les espèces protégées. De surcroît, les conditions météorologiques compatibles avec la sécurité aérienne imposaient une utilisation de l'équipement entre les mois d'octobre et de janvier, période durant laquelle s'effectue la nidification, particulièrement sensible aux nuisances résultant des atterrissages et décollages. En conséquence, l'effet combiné de ces contraintes réduisait les possibilités d'emploi de cette infrastructure à un mois par an seulement.

En janvier 1994, une tempête a entraîné la destruction partielle de l'ouvrage et l'administration a décidé l'abandon de la piste aéroportuaire de Terre Adélie.

Ainsi, le budget de l'Etat a supporté en pure perte une dépense avoisinant 110 millions de francs. La légèreté qui a marqué la conduite de cette opération est confirmée rétrospectivement par la facilité avec laquelle on semble avoir pris son parti de l'anéantissement de cet ouvrage.

Un article, de Artic polar challenges, relate également les méfaits que cette piste a causé:

Un autre cas d'atteinte à l'environnement concerne la construction d'une piste d'atterrissage française en Terre Adélie. Elle devait pouvoir supporter les gros porteurs et être bâtie sur un chapelet d'îles qui s'étendent en ligne droite sur une distance d'environ 1.000 mètres, tout à proximité de l'île des Pétrels où est installée la base Dumont d'Urville. Pour les responsables et scientifiques français, Paul-Emile Victor en tête, il s'agissait de ne plus risquer d'être bloqué par les glaces, de pouvoir conduire des recherches de courte durée, d'allonger les campagnes d'été d'octobre à mars et de pouvoir mener des études géophysiques sur le continent à partir du plateau sur lequel serait installée une station, le dôme C ; pour eux, l'impact sur la faune considéré comme faible ne valait pas qu'on arrêta le projet.
Pendant plusieurs années, l'affaire fit grand bruit. La raison de cette levée boucliers était simple : l'île des Pétrels sur laquelle est installée la base française est un site écologiquement exceptionnel - c'est d'ailleurs pour la richesse de ce site que la première base fran?aise, Port Martin (détruite par le feu dans les années 50 et remplacée par Dumont d'Urville), y avait été installée... Une fois n'est pas coutume, les scientifiques furent directement concernés et consultés. Un Comité des Sages fut, en effet, créé par le gouvernement français qui se prononça pour l'arrêt des travaux ; mais le rapport resta curieusement confiné dans les tiroirs pendant de nombreux mois. Le SCAR se pencha à son tour sur le problème en acceptant d'analyser un rapport produit par Greenpeace qui s'était rendu sur place et montrait du doigt l'insuffisance des études préalables d'impact sur l'environnement. Ne trouvant pas de solution, le SCAR se contenta d'avancer que les principes de telles évaluations n'avaient pas été prévus dans les articles du Traité au moment où les premiers travaux de terrassements avaient commencé.
L'UICN (Union Internationale pour la Conservation de la Nature et des ressources naturelles), elle aussi, se joignit au concert des protestations et demanda au gouvernement français de réfléchir à d'autres solutions. Du côté des écologistes, les protestations furent, on s'en doute, moins penaudes. On se souvient peut-être des militants de Greenpeace montant, à Brest en 1984, à bord d'un navire et s'installant en haut du mât pendant plus de 50 heures pour protester contre le fait que les cales transportaient du matériel destiné à la piste de la terre Adélie. Ou de l'escalade par six manifestants déguisés en manchots de la façade de l'immeuble parisien des Terres Australes et Antarctiques Françaises qui réclamaient la publication du rapport. Peine perdue : en novembre 87, le ministre des Dom Tom annonçait la reprise immédiate de travaux. Mais quelques années plus tard, alors que les critiques se faisaient de plus en plus vives, une énorme tempête drossa des icebergs contre la piste en construction et l'endommagea de telle manière que les Français abandonnèrent définitivement l'idée de poursuivre le projet, le coùt des travaux de réparations ayant été jugé trop élevé.

            En dehors de ces considérations politiques, financières et écologiques, moi, ça m'embêtait quand même, tous ces dégats, mais bon, on ne m'a sûrement pas demandé mon opinion. J'aurais aimé disposer d'une piste à un moment précis.Lors d'une visite de courtoisie à la fin de la période d'été, d'un C130 venu de Mac Murdo, (base américaine, voir carte). Il n'y avait pas de piste, et je ne sais pas s'il peuvent encore atterrir sur la nouvelle. A part les ULM, je ne sais pas. Ouais, je plaisante....Juste un peu.

 

Même les timbres étaient prêts...A gauche, le "nouveau", à droite, l'ancien...introuvables, maintenant.

            Je disais, pas de piste, alors, faut en faire une, l'hélico est encore là, on va à D10, là où on stocke le matériel jusqu'à l'été prochain. Je crois que ça a changé maintenant. Ils sont à Cap Prudhomme, on peut y aller en Zodiac, à cette époque. On reprend le Caterpillar, un D4, le petit, pour jouer, une herse est installée à l'arrière. Bon, v'la qu'on va ensemencer le plateau Antarctique, à ct'heure! Meuh non, c'est pour casser la pellicule de glace qui recouvre la neige(astrugis). Il faut une piste de 1000m, le C130 n'a pas besoin de tout ça, mais sécurité oblige.Des zig-zags pendant deux jours ont été nécessaires.Cela permet de vérifier l'absence de crevasses, également.

            Parce que les C130 n'aiment pas la terre Adélie, un s'est déja crashé en 1971 à D21 au décollage, problème de fusée d'apppoint Jato (Jet assisted take off). L'US Navy l' a récupéré en 1987, l'avantage de la conservation par la glace, rien ne rouille.Cette fois-ci, pas de souci, ils sont restés deux heures, juste un aller-retour à la base, et sont repartis, ils avaient même laissés les moteurs tourner!


Le mécanisme des vents catabatiques.

Au Dôme C et sur tout le haut plateau intérieur, à cause du bilan radiatif négatif, l'air au niveau de la surface de la calotte se refroidit constamment pour former un "réservoir" d'air froid (de -30° à -50° C) dans une couche de quelques centaines de mètres.

Au dessus de cette couche d'air froid et lourd, l'air est plus chaud, en général d'environ de 2°C, et plus léger, il y a inversion. Cet air froid ne peut s'élever dans l'atmosphère par convection, et quand le "réservoir" est plein, il doit s'évacuer d'une autre façon. Comme une pente existe, et sous l'influence de la force de gravité, il va donc s'écouler des hauts plateaux vers la bordure côtière.

Cet écoulement prend alors plusieurs formes.

Dans la partie haute du dôme, qui est presque plate, l'air va descendre en suivant la plus grande pente avec une vitesse modeste (Dôme C : moyenne annuelle 11,5 km/h).


La descente du vent catabatique.

Au fur et à mesure que l'on s'éloigne du dôme, la pente s'accentue. La vitesse de l'air, dont le mouvement est du à la force de gravité, augmente (D80 : moyenne annuelle 22,3 km/h). Le vent subit aussi la force de Coriolis qui le dévie vers la gauche dans l'hémisphère Sud, ce qui lui donne une composante d'Est parallèle aux lignes de contour du terrain.
A 100-200 km de la côte, la forme convexe de la calotte s'accroît nettement et le pourcentage devient vraiment plus fort. L'air va alors dévaler la pente en accélérant encore plus, jusqu'à atteindre sa vitesse d'équilibre pour laquelle l'accélération due à la gravité est compensée par le frottement du sol (D47 : moyenne annuelle 39,2 km/h). De plus, l'effet Coriolis devient négligeable devant la gravité, et le vent se déplace en suivant quasiment la ligne de plus grande pente, soit du Sud vers le Nord. Cela a pour conséquence qu'à Dumont d'Urville (DDU), le vent a une direction fortement privilégiée avec une grande persistance dans un secteur réduit.

Vents moyens de surface sur l'Antarctique.

A Dumont d'Urville (DDU : moyenne annuelle 39,6 km/h) la couche de vent, qui a une épaisseur de 100 à 500 m, arrive sur l'Océan Antarctique et la banquise, et se propage au large. Cette propagation se fait en général sur 10 à 100 km, mais on a vu des vents catabatiques descendant les Monts Transantarctique se propager sur 500 km à travers l'ice shelf de Ross. Cependant, en arrivant sur l'océan la dynamique perd tout de même son mécanisme moteur, la pente, et de plus elle rentre en conflit avec des masses d'air aux propriétés différentes. Ainsi, on peut noter que l'été la brise de mer qui se crée sur l'océan et remonte vers la côte peut entrer en conflit avec les vents catabatiques, ces derniers n'atteignant plus alors la côte.

L'arrivée constante d'air depuis l'intérieur du continent sur l'océan et la force de Coriolis créent de plus un mouvement général des vents autour de l'Antarctique, les Easterlies.

Sur la côte, le démarrage d'un épisode catabatique est difficile à prévoir. Il se produit le plus souvent quand la pression augmente et est lié au rapprochement des anticyclones subtropicaux. La durée d'un épisode est variable, de quelques heures à plusieurs jours.

Polar Easterliesr et Westerlies ( mouvement circumpolaire des perturbations).

L'action des vents catabatiques.

L'action générale de ces vents violents (d'autant plus violents que la pente est convexe) est importante.

D'abord ils agissent directement, avec la houle, sur la dislocation de la banquise au printemps et durant l'été, mais aussi parfois en plein hiver. De plus, ils maintiennent en hiver des ouvertures dans la banquise, les Polynies côtières, qui réapparaissent année après année à la même position. Ces ouvertures provisoires ou permanentes ont une action climatique planétaire certaine, car elles augmentent les échanges de chaleur entre l'océan et l'atmosphère dont l'air est réchauffé.

Les vents catabatiques réalisent aussi un transfert d'une grande quantité d'air de 2°C plus froid que la température de l'atmosphère ambiant, de la calotte glaciaire qui se réchauffe vers l'océan et les régions sub-polaires qui se refroidissent de 1°C environ. Ce transfert régulier a donc une influence directe sur la circulation générale autour de l'Antarctique et sur le climat planétaire.

Les zones de confluence

On peut se demander aussi pourquoi il y a des différences entre le régime des vents à Port Martin et à Dumont d'Urville, qui sont des sites pourtant proches si on se place à échelle de l'Antarctique.

En fait, le vent ne descend pas la pente d'une façon parfaitement radiale et uniforme, mais très irrégulièrement, avec des zones de confluence liées à la topographie du terrain, à la présence de montagnes ou de vallées glaciaires. Ainsi, sur les côtes le vent catabatique est toujours présent, mais localement il existe des zones où le relief canalise sur quelques kilomètres le vent d'une grande surface de la calotte. A la sortie de ces confluences, comme dans la zone de Cap Denison à Port Martin, dans la baie de Terra Nova ou sur la côte Siple, l'intensité du vent est alors sans égale.

à bientôt ...

 

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